Infirmier
Choc hémorragique : aspects physiopathologiques et prise en charge hémodynamique*
Hemorrhagic Shock: Pathophysiological Aspects and Hemodynamic Management
1
CHU Nancy, service de réanimation médicale Brabois, pôle cardiovasculaire et réanimation médicale, hôpital Brabois, F-54511 Vandœuvre-Lès-Nancy, France
2
INSERM, groupe choc, U1116, Faculté de médecine, F-54511 Vandœuvre-Lès-Nancy, France
3
Université de Lorraine, F-54000 Nancy, France
a e-mail : b.levy@chu-nancy.fr
Reçu :
15
Novembre
2014
Accepté :
8
Décembre
2014
Le choc hémorragique se caractérise par une diminution du volume sanguin circulant, induisant une diminution du retour veineux. Il se caractérise par trois phases : une phase sympatho-excitatrice secondaire à l’hypovolémie aiguë dont l’objectif est de redistribuer le volume sanguin vers les organes nobles au prix d’une hypoperfusion de zones « sacrifiées » (peau, tube digestif, rein), une phase sympatho-inhibitrice qui survient au-delà de 50% de pertes sanguines caractérisée par une bradycardie dite « paradoxale » dont l’objectif est d’optimiser le remplissage ventriculaire passif, et enfin la phase de reperfusion. Dans les zones hypoperfusées, l’altération de la microcirculation fait le lit de la réponse inflammatoire systémique à l’origine d’une vasoplégie inappropriée et participe à la coagulopathie. Des travaux récents montrent également une insuffisance surrénalienne fréquente associée à une augmentation des besoins en vasopresseurs. Dans l’attente du contrôle du saignement, l’objectif est de maintenir la perfusion des organes afin de limiter hypoxie, inflammation et dysfonctions d’organes. On parle de damage control ressuscitation, qui comprend hypotension artérielle « permissive » et remplissage à bas volume. Le but est d’éviter excès de remplissage et hémodilution secondaire et recours trop précoce aux vasopresseurs. Les objectifs hémodynamiques (hors traumatisme crânien grave) sont une pression artérielle systolique de 8090 mmHg et une moyenne de 50-60 mmHg dans l’attente de l’hémostase. Il faut privilégier le remplissage vasculaire par cristalloïdes, avec une place grandissante pour les solutés balancés. En cas de recours aux vasopresseurs, la noradrénaline est recommandée et un monitorage du débit cardiaque semble indispensable.
Abstract
Hemorrhagic shock is characterized by a decrease in circulating blood volume that leads to a decrease in the venous return. Three stages occur during the hemorrhagic shock including an initial central sympathetic activation due to acute hypovolemia aiming to redistribute blood to vital organs, followed by a central sympathetic inhibition that occurs beyond 50% blood loss characterized by bradycardia called “paradoxical” aiming to optimize the passive ventricular filling and finally a reperfusion phase. In sacrificed areas (splanchnic, muscular and kidney vasculature beds), impaired microcirculation leads to systemic inflammatory response that is responsible for an inappropriate vasoplegia. The alteration of microcirculation also promotes coagulopathy. Recent studies show frequent adrenal insufficiency associated with increased need for vasopressors. As long as the bleeding is uncontrolled, the physician should maintain oxygen delivery to limit tissue hypoxia, inflammation and organs dysfunction. This strategy is called “damage control resuscitation”. It combines “permissive hypotension” and low-volume resuscitation. Our main objectives are to prevent overfilling and secondary haemodilution and too early use of vasopressors. Hemodynamic goals (excluding severe head injury) are to avoid exceeding a systolic blood pressure of 90 mmHg and a mean arterial pressure of 60 mmHg until hemostasis is achieved. Fluid resuscitation should favor crystalloids with an increasing role for balanced solutes. Norepinephrine is now recommended and management of catecholamine and fluid resuscitation should be associated with cardiac output monitoring.
Mots clés : Choc hémorragique / Hypotension artérielle permissive / Remplissage vasculaire / Noradrénaline
Key words: Hemorrhagic shock / Permissive hypotension / Fluid loading / Norepinephrine
© SRLF et Lavoisier SAS 2014